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Don Quijote
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Sélection des astéroïdes cibles pour la mission Don Quijote de l’ESA

27/09/2005 1463 views 0 likes
ESA / Space in Member States / Belgium - Français

ESA PR 41-2005. S’appuyant sur les recommandations de spécialistes des astéroïdes, l’ESA a sélectionné deux astéroïdes cibles pour sa mission Don Quijote de déviation de la trajectoire d’un géocroiseur (astéroïde évoluant à proximité de la Terre ou NEO).

L’équipe « concepts de pointe » de l’ESA (ACT) est en train d’étudier en détail cette mission. Au début de l’année, le Groupe consultatif sur les missions NEO (NEOMAP), constitué d’experts chevronnés, a fourni à l’ESA un rapport sur le choix des cibles pour les futures missions européennes de réduction des risques de collision avec un astéroïde. Ce rapport a défini les critères présidant à la sélection d’un astéroïde cible et a identifié deux objets qui répondent à la plupart de ces critères. Leurs dénominations provisoires sont 2002 AT4 et 1989 ML.

Tenant compte de ces éléments et bénéficiant du soutien d’experts en charge de l’Installation de conception pluridisciplinaire (CDF) de l’Agence, l’ACT a procédé à une évaluation exhaustive des architectures de mission appropriées ainsi que des stratégies de lancement, des options en matière de système de propulsion et des expériences.

Le scénario actuel prévoit deux véhicules spatiaux parcourant des trajectoires interplanétaires distinctes. L’un d’entre eux (Hidalgo) devant percuter l’astéroïde cible, tandis que l’autre (Sandro) arrivera plus tôt à proximité, procédera aux opérations de rendez-vous et se placera en orbite autour de l’astéroïde pendant plusieurs mois pour l’observer avant et après l’impact, de manière à pouvoir détecter toute modification ultérieure de sa trajectoire.

Dans le cadre des études industrielles qui vont démarrer très prochainement, des experts européens devront proposer des solutions de rechange en ce qui concerne la conception de cette mission NEO précurseur à faibles coûts. Il s’agira de la première étape vers le développement d’un dispositif de lutte contre les impacts des astéroïdes : l’une des rares catastrophes naturelles que nos technologies peuvent prévenir.

Une collision évitée de justesse ?

Représentation artistique d'une collision entre la Terre et un astéroïde
Représentation artistique d'une collision entre la Terre et un astéroïde

Tandis qu’à Noël dernier toute la planète avait les yeux braqués vers le tsunami qui ravageait l’Asie, un groupe de scientifiques s’inquiétait d’une autre menace d’origine naturelle qui aurait pu tourner en catastrophe : l’impact d’un astéroïde.

Le 19 décembre, un astéroïde d’environ 400 m de diamètre (2004 MN4), dont on avait perdu la trace depuis sa découverte six mois plus tôt, fut à nouveau observé, ce qui a permis de calculer son orbite. On a immédiatement compris que le risque qu’il percute la Terre, à l’occasion d’une « rencontre proche » en 2029, était inhabituellement élevé. À mesure que les jours passaient, cette probabilité n’a pas diminué, cet astéroïde devenant le plus menaçant parmi tous ceux répertoriés jusqu’alors sur les échelles de Turin et de Palerme : les échelles qui mesurent le risque d’impact d’un astéroïde à la manière dont l’échelle de Richter mesure la magnitude d’un tremblement de terre.

Seules les premières observations de cet objet et le calcul plus précis de sa trajectoire permirent de démontrer qu’il n’entrerait pas en collision avec la Terre – du moins pas en 2029. Bien qu’improbable, une collision à une date ultérieure n’est pas totalement exclue. Il est en effet extrêmement difficile de dire ce qui va se produire si nous ne trouvons pas un meilleur moyen de suivre sa trace et celle d’autres NEO et si nous ne prenons pas les mesures nécessaires à cet effet.

La majorité des experts internationaux estiment que ces moyens sont désormais à notre portée. Une mission telle que Don Quijote de l’ESA pourrait ainsi être la première mission en mesure d’évaluer la menace posée par un NEO et de prendre des mesures concrètes pour dévier sa trajectoire.

De même que toute bonne représentation théâtrale doit être précédée de répétitions, et pour nous préparer à affronter une telle menace, nous devons tout d’abord tester nos moyens matériels sur un astéroïde inoffensif. Don Quijote sera ainsi la première mission à réaliser une telle opération. La question majeure étant : quel astéroïde retenir et à quoi celui-ci doit-il ressembler ?

Trouver la cible idéale

Les astéroïdes sont tous dífférents
Les astéroïdes sont tous dífférents

La population des NEO se composant d’une diversité extravagante d’objets, il n’est pas facile de choisir les paramètres physiques les plus appropriés pour lutter contre les risques qu’ils représentent. Toutefois, les experts du NEOMAP ont relevé le défi et ont livré à l’Agence, en février 2005, leurs recommandations sur les critères de sélection des astéroïdes dont la trajectoire pourrait être déviée.

Il n’est pas illégitime de se demander si l’exécution d’un essai tel que celui prévu pour la mission Don Quijote fait ou non courir un risque à notre planète. Les choses pourraient-elles mal tourner ? Pourrions-nous créer un problème au lieu d’apprendre comment en éviter un ?

Les spécialistes internationaux répondent par la négative. Ils estiment que même l’impact très puissant d’un véhicule spatial lourd sur un petit astéroïde ne provoquerait qu’une modification infime de son orbite. En fait, cette modification serait si faible que la mission Don Quijote nécessite deux véhicules spatiaux. Le deuxième devra surveiller l’impact du premier et mesurer la variation minime des paramètres orbitaux de l’astéroïde, qui ne seraient pas repérables depuis la Terre.

On peut également sélectionner des objets cibles qui ne susciteraient aucune inquiétude, en étudiant les variations de distance entre leurs orbites et celle de la Terre au fil du temps. Si l’astéroïde cible ne coupe pas l’orbite de la Terre, comme cela est le cas avec les NEO de la famille Amor (dont l’orbite au périhélie dépasse nettement 1 UA), l’exécution d’une manœuvre de déviation ne présente aucun risque pour la Terre.

Orbites typiques pour les astéroïdes à l'interne du système solaire
Orbites typiques pour les astéroïdes à l'interne du système solaire

D’autres considérations liées à l’orbite de l’astéroïde cible sont également importantes, en particulier le changement de vitesse orbitale nécessaire pour que le véhicule « rattrape » l’astéroïde cible (le delta V). Cette vitesse devra être suffisamment faible pour minimiser le volume d’ergols requis et permettre l’utilisation de lanceurs peu onéreux, tout en étant suffisamment importante pour rendre possible l’utilisation du même satellite avec plusieurs cibles.

Les impératifs en matière de navigation et de mesures de la déviation de l’astéroïde font peser de lourdes contraintes sur le choix de la cible. La forme, la densité et la taille de l’astéroïde sont des paramètres importants, mais souvent mal connus. Ainsi, pour placer un véhicule en orbite autour d’un astéroïde faut-il connaître le champ gravitationnel de cet objet, de même qu’il faut connaître la position de son centre de masse afin de déterminer l’endroit visé par le véhicule impacteur.

La variété des astéroïdes est très grande, mais deux catégories principales prédominent pour ce qui est de la composition. Nos connaissances, encore assez rudimentaires, de l’importante population d’astéroïdes de différents types qui croisent à proximité de la Terre indiquent que le prochain astéroïde constituant une menace sera plus vraisemblablement de type C que de type S. Ceux de type C ont une surface sombre possédant une signature spectrale caractéristique des matières carbonées, tandis que ceux de type S présentent des surfaces plus brillantes dont les spectres s’apparentent de près à ceux des silicates. Les propriétés de surface de l’astéroïde cible – et notamment le pourcentage de lumière qu’il réfléchit – sont un facteur critique durant la phase finale de navigation de l’impacteur. Plus l’astéroïde est brillant, plus il constitue une cible facile. Toutefois, dans le cadre d’un exercice de répétition, l’objectif ne doit pas non plus être trop facile.

L’ESA a sélectionné les astéroïdes 2002 AT4 et (10302) 1989 ML comme objectifs cibles de sa mission car ils représentent le meilleur compromis parmi tous les critères de sélection (dont certains sont parfois contradictoires). La décision sur le choix de l’un d’entre eux comme destination finale des deux véhicules Sancho et Hidalgo sera prise en 2007.

 

Don Quijote – le retour du chevalier errant

La phase des études internes relatives à la mission Don Quijote est achevée et il incombe désormais à l’industrie spatiale de suggérer des conceptions techniques appropriées. L’ESA a envoyé un appel d’offres ouvert aux sociétés spatiales européennes pour qu’elles soumettent des propositions de conceptions. La sélection des offres les plus prometteuses aura lieu vers la fin de l’année. Début 2006, deux équipes devraient commencer à travailler sur leurs propositions de mission de démonstration technologique. Un an plus tard, lorsque les résultats seront disponibles, l’ESA sélectionnera la conception définitive à mettre en œuvre : Don Quijote sera alors prêt à s’attaquer à un astéroïde !

Note aux rédactions:

L'impact d'Hidalgo avec un astéroïde
L'impact d'Hidalgo avec un astéroïde

Don Quijote est une mission d’essai de technique de déviation d’un NEO qui s’appuie en totalité sur des technologies classiques en matière de véhicules spatiaux. Cette mission comprendra deux véhicules : l’un d’entre eux (Hidalgo) percutera un astéroïde à une vitesse relative très élevée, tandis que l’autre (Sancho) sera déjà en poste à proximité de l’astéroïde avant l’impact, et y restera ensuite, afin de mesurer la variation des paramètres orbitaux et de procéder à l’étude du géocroiseur.

L’astéroïde 2004 MN4 a désormais reçu une appellation officielle : 99942 Apophis. Des observations récentes par radar Doppler avec le radiotélescope d’Arecibo à Porto Rico ont revu à la baisse sa probabilité d’impact avec la Terre et indiqué que celle-ci était très faible, sans être pour autant totalement exclue. En 2029, cet astéroïde « frôlera » la Terre à une distance de 32 000 km, soit la distance la plus faible jamais enregistrée pour un objet de cette taille. Sa trajectoire croisera celle de l’orbite géosynchrone sur laquelle évoluent la plupart des satellites météorologiques et de télécommunication. En outre, cet astéroïde sera visible à l’œil nu. D’autres mesures radar devront être faites en 2013.

Les astéroïdes 2002 AT4 et (10302) 1989 ML, cibles de la mission Don Quijote, ne présentent aucun danger pour notre planète.

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