Simulation de rendez-vous réussie pour Jules Verne au Centre de Contrôle de l'ATV
Pour la première fois, trois centres de contrôle des vols habités - situés dans trois pays différents - ont simulé avec succès cette semaine les délicates manœuvres de rendez-vous du Véhicule de Transfert Automatique, le plus grand et le plus complexe vaisseau spatial automatique, avec la Station spatiale internationale.
Le véritable rendez-vous aura lieu au début de 2008 avec le lancement et l'amarrage du vaisseau spatial le plus sophistiqué jamais construit en Europe, le Véhicule de Transfert Automatique (ATV) Jules Verne.
"Nous sommes prêts pour l'approche finale du rendez-vous," a indiqué le Centre de Contrôle de l'ATV (ATV-CC), situé au centre spatial du CNES à Toulouse, avec un accent français prononcé. "Vous avez un « Go » pour l'approche finale de MCC-H (Mission Control Centre Houston)," a répondu le Centre de Contrôle de mission de Houston avec un accent texan. Et, finalement, une troisième voix, clairement celle d'un interlocuteur russe au Centre de Contrôle de Moscou (TsUP) : "Okay, vous avez un « Go » pour l'approche finale jusqu'à l'amarrage".
"C'est un grand bond en avant pour les opérations de vols habités en Europe, et les équipes du centre de contrôle de l’ATV qui ont prouvé qu'elles peuvent travailler efficacement dans l'environnement de l'ISS, ce qui n'est pas chose facile," a déclaré Bob Chesson, le responsable à l'ESA des Opérations pour les Vols Habités et l’Exploration. "Aujourd'hui, c’est le plus grand succès après plus de sept ans d'efforts au Centre de Contrôle de l'ATV."
Pour la première fois, le nouveau Centre de Contrôle de l'ATV à Toulouse a eu le rôle de leader en tant que responsable des opérations soumises aux normes des vols habités pour l'ATV, tandis que les Centres de Contrôle à Moscou et à Houston ont aidé et autorisé le rendez-vous avec l'ISS en temps réel. Les équipes d’une cinquantaine de personnes à Toulouse avaient la responsabilité de donner le OK en envoyant les commandes au vaisseau spatial automatisé.
Orchestre
La simulation a commencé presque huit heures avant l’amarrage avec l'ISS. C’était particulièrement compliqué parce qu'elle devait respecter toutes les étapes programmées par l'ATV-CC et toutes les tâches qui devaient être exécutées dans les différents centres concernés. L’équipage de l'ISS, qui était représenté par des ingénieurs à Moscou, était aussi impliqué dans ce processus. Le rôle de chaque centre est clairement défini selon une logique séquentielle.
Globalement, cette délicate performance peut être comparée à trois groupes différents de musiciens situés dans différentes régions du monde, sur différents fuseaux horaires, et jouant ensemble comme un seul orchestre, chacun jouant sa partition en mesure et sans fausses notes. Cependant, ces simulations s’avèrent plus difficiles qu'une « générale » de concert ; le programme minuté de la trajectoire d’approche orbitale - avec des facteurs comme les restrictions d'illumination du soleil en orbite et les exigences de survol des stations sol russes – rend impossible l’arrêt et la reprise d’une phase du vol si le retard accumulé dépasse 20 minutes. Dans ce cas, le rendez-vous doit être annulé, et la simulation se solde par un échec.
Mises au point
"Nous sommes vraiment satisfaits du succès de cette première simulation conjointe qui prouve que le système fonctionne bien et que maintenant chacun, y compris les partenaires, savent que nous sommes sur la bonne voie pour réussir!", note Dominique Cornier, responsable des Opérations du projet ATV à l’ESA. Il a mis au point, avec les partenaires russes et américains, ainsi qu’avec le CNES et les spécialistes d’Astrium, les procédures (Multi-Element Procedures, MEPs) requises pour assigner à chaque centre leurs tâches respectives.
"Certaines améliorations et réglages dans la synchronisation des différents centres de contrôle peuvent encore être réalisées. C'est pourquoi nous projetons une douzaine de simulations supplémentaires, y compris avec des scénarios de pannes, avant la mission réelle Jules Verne. Mais globalement, nous sommes tout à fait satisfaits de ce succès ; cela a également prouvé que nos équipes sont capables de réagir en temps réel aux petites anomalies que nous avons rencontrées ", a indiqué Hervé Côme, directeur de mission pour l'ESA à l’ATV-CC pendant cette première simulation conjointe.
Une centaine de contrôleurs
A mesure que l'ATV s'approche de l'ISS pendant le rendez-vous, les contrôleurs de vol de l'ATV-CC permettent à Jules Verne de poursuivre ses étapes prédéfinies en utilisant des détecteurs optiques et la technologie du GPS. Cette approche exige l'autorisation du centre de contrôle de mission à Moscou (MCC-M) - parce que l’ATV s'amarre au segment russe Svezda de l'ISS - et une coordination globale avec le centre de contrôle de mission à Houston (MCC-H), qui est responsable de l'ensemble de l’ISS. Pour chacune de ces étapes, l'ATV exécute des manœuvres automatisées qui sont étroitement surveillées par environ 100 contrôleurs dans trois pays.
"Même si le comportement de l'ATV et la complexité de l'ISS sont simulés avec de puissants ordinateurs, la simulation intégrée teste en vrai la pleine compatibilité des systèmes audio, vidéo et des énormes ordinateurs des différentes agences spatiales dans le monde," a indiqué Martial Vanhove, le directeur de vol de l'ATV pour le CNES, qui était la voix du centre de contrôle de Toulouse.
Travail d'équipe
La simulation vérifie également le travail d'équipe et l'interaction entre les vrais opérateurs de plusieurs pays et de culture technologique différente. Enfin, le simulateur de l'ATV à Toulouse fonctionne avec le vrai logiciel ultra perfectionné de Jules Verne, qui possède presque 10 fois le nombre de lignes de code utilisé par Ariane 5. Des milliards de « bits » de télémétrie ont également été échangés entre les différents centres.
"Nous félicitons nos collègues européens de ATV-CC et de COL-CC (Centre de Contrôle Columbus à Oberpfaffenhofen, près de Munich pour les communications) ainsi que nos collègues russes à MCC-M, pour la réalisation de cette étape importante dans la préparation des opérations de la mission Jules Verne. Nous attendons vivement la suite de la campagne de simulations au MCC-H et au centre d’entrainement de la Station Spatiale (Space Station Training Facility, SSTF) à Houston, et aussi à l'ATV-CC," a indiqué Adam Baker, le représentant de la NASA qui a participé à cette simulation, depuis le centre de contrôle de Toulouse en tant qu'officier de liaison international. Il a aussi mis au point les procédures entre les différents centres (Multi-Element Procedures) pour ce qui concerne la NASA.
Au cours des prochaines simulations conjointes, des représentants de chaque agence spatiale seront postés dans chacun des trois centres de contrôle. Pour cette simulation, plus de 30 spécialistes au service de la NASA, ont travaillé au centre de contrôle de mission dans le « bâtiment 30 Sud » de Houston; la même équipe sera assignée à la mission de Jules Verne l'an prochain.
Pour la prochaine simulation conjointe, prévue en fin août, les futurs membres de l’équipage de l’ISS assureront également depuis Moscou la surveillance l'ATV pendant son approche de l'ISS. Même si l’ATV est un vaisseau spatial entièrement automatisé capable de tolérer plusieurs défaillances l’équipage, de l’ISS peut indépendamment, en cas d'urgence, faire démarrer une manœuvre d'évitement (Collision Avoidance Manœuvre, CAM) pour éloigner le vaisseau spatial (de 20 tonnes) de la Station pendant la phase de rendez-vous.