N° 28–2018: BepiColombo décolle pour aller percer les mystères de Mercure
20 October 2018
La mission BepiColombo de l’ESA et de la JAXA à destination de Mercure a décollé à bord d’une Ariane 5 depuis le port spatial de l’Europe à Kourou à 1 h 45 mn 28 s (TU) le 20 octobre pour une mission audacieuse qui a pour but de percer les mystères de la planète la plus proche du Soleil.
Le centre de contrôle de l’ESA à Darmstadt (Allemagne) a reçu à 2 h 21 TU, par l’intermédiaire de la station de poursuite de New Norcia, des signaux confirmant que le lancement s’est bien déroulé.
BepiColombo est une initiative commune de l’ESA et de l’Agence japonaise d’exploration aérospatiale (JAXA). Il s’agit de la première mission européenne à destination de Mercure, la planète la plus petite et la moins explorée à ce jour du Système solaire interne. Ce sera également la première mission constituée de deux engins spatiaux qui effectueront simultanément des mesures complémentaires de la planète et de son environnement dynamique.
« Le lancement de BepiColombo constitue pour l’ESA et la JAXA une étape majeure qui est elle-même le prélude de nombreuses réussites ultérieures », a déclaré le Directeur général de l’ESA, Jan Wörner.
« Outre le périple complexe qu’elle va effectuer, cette mission livrera une riche moisson de données scientifiques. C’est grâce à une collaboration internationale et à des dizaines d’années de travail de toutes les personnes hautement compétentes impliquées dans la conception et la construction de cet incroyable véhicule spatial que nous allons pouvoir étudier les mystères de Mercure ».
« Je félicite les équipes pour la réussite de ce lancement d’Ariane 5 qui emporte à son bord BepiColombo, la mission conjointe ESA‑JAXA d’exploration de Mercure », vient de déclarer Hiroshi Yamakawa, Président de la JAXA.
« Je tiens à leur exprimer toute ma gratitude pour le déroulement parfait des opérations de lancement. La JAXA espère vivement que les futures observations détaillées de la surface et de l’intérieur de Mercure nous aideront à mieux comprendre son environnement et, par conséquent, l’origine du Système solaire et de la Terre ».
BepiColombo se compose de deux orbiteurs scientifiques : l’orbiteur planétaire de Mercure (MPO) de l’ESA et l’orbiteur magnétosphérique de Mercure (MMO ou « Mio ») de la JAXA. Construit par l’ESA, le module de transfert vers Mercure (MTM) transportera les orbiteurs jusqu’à Mercure en combinant un système de propulsion hélioélectrique et plusieurs manœuvres d’assistance gravitationnelle dont un survol de la Terre, deux survols de Vénus et six survols de Mercure avant de se satelliser autour de cette planète fin 2025.
« Nous avons encore un chemin long et périlleux à parcourir avant que BepiColombo commence à recueillir des données pour la communauté scientifique », a indiqué Günther Hasinger, Directeur de la Science de l’ESA.
« Les initiatives telles que la mission Rosetta et les découvertes révolutionnaires dont elles sont à l’origine, même des années après leur achèvement, nous ont déjà montré que la longue attente avant la réalisation de missions d’étude scientifique complexes est pleinement récompensée ».
Certains instruments des deux orbiteurs scientifiques pourront également fonctionner au cours de la phase de croisière, ce qui permettra de recueillir de précieuses données scientifiques concernant Vénus. En outre, plusieurs instruments conçus pour étudier un aspect particulier de Mercure pourront être utilisés pour étudier des caractéristiques totalement différentes de Vénus, laquelle possède une atmosphère dense contrairement à Mercure dont la surface est bien visible.
« BepiColombo est l’une des missions interplanétaires les plus complexes que nous ayons jamais lancée », a précisé Andrea Accomazzo, responsable de la trajectoire de vol de BepiColombo à l’ESA.
« L’un des défis les plus importants à relever est la gravité considérable exercée par le Soleil, ce qui rend particulièrement difficile l’insertion d’un véhicule spatial sur une orbite stable autour de Mercure. En effet, il faudra constamment exercer un freinage afin de garder sous contrôle la trajectoire en direction du Soleil, tandis que les propulseurs ioniques fourniront la faible poussée requise durant de longues séquences de la phase de croisière ».
Parmi les autres défis auxquels le véhicule spatial sera confronté, il faut citer des températures extrêmes comprises entre -180° C et plus de 450° C (soit davantage qu’à l’intérieur d’un four à pizza). De nombreux mécanismes et revêtements de protection de BepiColombo n’ont jamais été testés dans de telles conditions.
Les trois modules sont eux aussi conçus de façon à pouvoir affronter des conditions extrêmes. Les grands panneaux solaires du module de transfert doivent être inclinés à angle droit pour éviter d’être endommagés par des radiations, tout en fournissant en même temps suffisamment d’énergie au véhicule spatial. Quant au MPO, son radiateur de grande taille lui permettra de dissiper efficacement la chaleur produite par ses sous-systèmes ainsi que celle provenant de l’extérieur lorsqu’il survolera Mercure à des altitudes très basses où aucun autre engin spatial ne s’est risqué auparavant. Ayant la forme d’un prisme octogonal, le module Mio effectuera sur lui-même 15 rotations par minute afin de répartir la chaleur du Soleil de manière homogène sur ses panneaux solaires et éviter ainsi tout phénomène de surchauffe.
« Voir notre sonde s’envoler dans l’espace est un moment que nous attendions tous avec impatience », a déclaré Ulrich Reininghaus, responsable du projet BepiColombo à l’ESA. « Nous avons surmonté de nombreux obstacles au fil des années et les équipes sont heureuses de voir que BepiColombo a désormais entamé son périple vers la planète Mercure qui recèle de nombreux mystères ».
Quelques mois avant l’arrivée à proximité de Mercure, le module de transfert sera largué, après quoi les deux orbiteurs scientifiques (toujours connectés l’un à l’autre) seront capturés par le champ gravitationnel de Mercure. Les propulseurs du MPO permettront alors d’ajuster leur altitude jusqu’à ce que soit atteinte l’orbite polaire elliptique voulue pour le MMO. Ensuite, le MPO se séparera pour entamer sa descente jusqu’à son orbite propre en utilisant ses propulseurs.
Les deux orbiteurs effectueront simultanément des mesures qui révéleront la structure interne de Mercure, la nature de sa surface et l’évolution de ses caractéristiques géologiques (dont la présence de glace dans ses cratères qui se trouvent à l’ombre), ainsi que les interactions entre la planète et le vent solaire.
« Le fait que deux engins spatiaux surveilleront Mercure en même temps depuis deux orbites différentes rend cette mission tout à fait unique : cela sera fondamental pour comprendre les processus liés à l’impact du vent solaire à la surface de Mercure et dans son environnement magnétique », a précisé Johannes Benkhoff, responsable scientifique du projet BepiColombo à l’ESA.
« BepiColombo tirera parti des découvertes et des questions soulevées par la mission Messenger de la NASA pour faire progresser les connaissances sur Mercure et sur l’évolution du Système solaire, ce qui à son tour s’avérera essentiel pour comprendre comment se forment et évoluent les planètes qui, dans des systèmes exoplanétaires, gravitent à proximité de leur étoile ».
À propos de l’Agence spatiale européenne
L’Agence spatiale européenne (ESA) constitue la porte d’accès de l’Europe à l’espace.
L’ESA est une organisation intergouvernementale créée en 1975, dont la mission consiste à œuvrer au développement des capacités spatiales de l’Europe en veillant à ce que les investissements dans le secteur spatial bénéficient aux citoyens européens et du monde entier.
L’ESA compte vingt-deux États membres : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays‑Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, la Roumanie, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse. La Slovénie a le statut de membre associé.
L’ESA a mis en place une coopération officielle avec six autres États membres de l’UE. Par ailleurs, le Canada participe à certains programmes de l’ESA au titre d’un accord de coopération.
En coordonnant les ressources financières et intellectuelles de ses membres, l’ESA peut entreprendre des programmes et des activités qui vont bien au-delà de ce que pourrait réaliser chacun de ces pays à titre individuel. Elle coopère en particulier avec l’UE à la mise en œuvre des programmes Galileo et Copernicus ainsi qu’avec EUMETSAT pour le développement de missions météorologiques.
Grâce aux lanceurs, aux satellites et aux moyens sol développés par l’ESA, l’Europe joue un rôle de premier plan sur la scène spatiale mondiale.
Aujourd’hui, l’ESA développe et place en orbite des satellites d’observation de la Terre, de navigation, de télécommunication et d’astronomie, expédie des sondes jusqu’aux confins du Système solaire et participe à l’exploration humaine de l’espace. L’ESA mène également un vaste programme d’applications couvrant le développement de services dans le domaine de l’observation de la Terre, de la navigation et des télécommunications.
Pour en savoir plus sur l’ESA : www.esa.int