La traversée de l’Afrique avec EGNOS
Survoler l’Afrique avec des moyens de navigation fournis par les satellites, c’est ce qu’entreprend l’Agence spatiale européenne la semaine prochaine entre le Sénégal et le Kenya.
Un ATR 42 de l’ASECNA (Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar), spécialisé dans les vols d’essai, a été équipé pour pouvoir voler en recevant les signaux EGNOS, le service complémentaire géostationnaire européen de navigation par satellite.
Il va ainsi survoler la majeure partie du continent africain en empruntant les couloirs aériens et surtout en effectuant ses atterrissages avec le banc d’essai EGNOS ou plus précisément l’ ISA (Interregional Satellite Based Augmentation System over Africa-Indian ocean region) qui est l’extension d’EGNOS pour l’Afrique.
L’appareil, qui décollera de Dakar le 16 mai, doit notamment faire escale à N’djamena, au Tchad, avant de rejoindre Nairobi. Il réalisera de plus une série de vols de démonstration à partir de l’aéroport de la capitale kenyane.
EGNOS est un programme de l’Agence spatiale européenne, la Commission européenne et Eurocontrol, l’organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne. Développé par un consortium industriel dirigé par Alcatel Space, EGNOS est constitué d’un réseau d’une quarantaine d’éléments répartis dans toute l’Europe pour enregistrer, corriger et améliorer les données du GPS américain.
Les signaux modifiés sont ensuite relayés par des satellites géostationnaires vers les récepteurs des usagers, offrant une précision inférieure à deux mètres contre 15/20 mètres pour les signaux GPS, avec en plus une garantie de qualité des signaux, ce que le GPS, système militaire, refuse de fournir.
Pour l’Afrique, depuis 2002, des stations ont été implantées dans plusieurs pays. Actuellement l’ISA comporte 10 stations de référence installées au Tchad, au Cameroun, en Centrafrique, au Congo, en Ethiopie, au Kenya, en Zambie, en Namibie, et en Afrique de Sud. Ce réseau spécifique permet d’avoir sur toute l’Afrique les corrections et les améliorations des signaux GPS comme en Europe, ces stations étant reliées au banc d’essai EGNOS situé à Hönefoss, en Norvège.
Les démonstrations sur l’Afrique ont lieu dans le cadre de ProDDAGE (Programme for Development and Demonstration of Applications for Galileo and EGNOS) en liaison avec la GJU (Galileo Joint undertaking), l’entreprise commune Galileo, crée par l’ESA et la Commission Européenne.
L’ESA a déjà démontré qu’en Afrique des atterrissages en toute sécurité peuvent être effectués grâce à EGNOS, plusieurs campagnes d’essai ayant déjà eu lieu, en particulier au Sénégal en février 2003. L’avantage de ces procédures est de fournir sur chaque piste une approche à guidage vertical sans infrastructure spécifique au sol.
C’est donc une sécurité supplémentaire qui est apportée par ces moyens venus de l’espace qui vont aussi permettre le développement d’un trafic en toute sécurité sur des aérodromes secondaires qu’il reviendrait trop cher d’équiper en moyens classiques d’aide à l’atterrissage. Le GPS seul ne peut pas fournir ce guidage vertical ni en assurer l’intégrité. EGNOS est compatible avec des systèmes équivalents mis en place à travers le globe en Amérique du nord, au Japon et en Inde, ce que l’on appelle les systèmes de complément satellitaires SBAS (Satellite-Based Augmentation Systems).
Avec ces nouveaux vols d’essai il s’agit de démontrer la viabilité du système pour l’ensemble du continent africain d’autant que les Etats d’Afrique et de l’Océan Indien ont adopté une stratégie pour l’utilisation de la navigation par satellite dans leur région dans le cadre de l’organisation de l’aviation civile internationale (OACI).
Cette traversée pionnière de l’Afrique s’inscrit ainsi dans une opération de grande ampleur visant à apporter à toute l’Afrique une meilleure sécurité dans la circulation aérienne. EGNOS est en ce moment en cours de recette et sera déclaré progressivement opérationnel en Europe d’ici à début 2006 avec une certification pour la navigation aérienne et les services de sûreté de la vie (safety of life services) d’ici 2007.