Le Directeur Général de l'ESA rencontre la presse
Ce matin, le Directeur Général de l'Agence Spatiale Européenne, Antonio Rodotà, s'est adressé à la presse.
Mesdames, Messieurs,
Je tiens d’abord à vous remercier chaleureusement d’avoir bien voulu accepter notre invitation à ce traditionnel rendez-vous de janvier et à vous transmettre, ainsi qu’à vos proches et à vos collègues, mes meilleurs vœux de santé, de bonheur et de réussite, tant sur le plan privé que professionnel, pour l’année 2002.
Vous êtes, pour la plupart, bien informés de la vie de notre organisation dont vous partagez les réussites et les préoccupations au fil de l’année. Vous nous aidez à diffuser les messages appropriés aux décideurs et à expliquer nos activités au grand public. Je vous remercie de cette précieuse contribution, en espérant que l’espace continuera à bénéficier de votre intérêt et de votre soutien dans l’année qui vient.
Avant de passer à la séance des questions et réponses, permettez-moi de passer en revue certains des hauts faits de 2001 et d’évoquer les principaux événements programmés pour 2002. J’inviterai également M. Jean-Pol Poncelet, nommé voici peu au poste de Directeur Stratégie et relations extérieures de l’ESA, à parler de nos relations avec l’Union européenne et des nouveaux liens et synergies que nous nous employons à développer avec cette institution. M. Claudio Mastracci, Directeur des Applications, contribuera à répondre comme il convient aux questions sur le projet Galileo que vous ne manquerez certainement pas de poser.
Résultats marquants en 2001
Le 19 avril marque le départ - à bord de la navette américaine - du premier astronaute européen, l’Italien Umberto Guidoni, pour la Station spatiale internationale (ISS), dans le cadre d’une mission de 11 jours.
En mai, l’ESA et l’agence russe de l’aéronautique et de l’espace Rosaviakosmos ont signé un accord prévoyant l’envoi d’un nombre plus important d’astronautes européens vers la Station spatiale internationale à bord de lanceurs russes Soyouz pendant la période 2001-2006.
En octobre, l’astronaute française de l’ESA Claudie Haigneré a été la première femme européenne à prendre le chemin de la Station spatiale internationale à bord d’un véhicule Soyouz lancé de Baïkonour pour une mission de 10 jours.
Le 12 juillet, une Ariane-5 décollait de Kourou, emportant à son bord le satellite de télécommunications Artemis. Ce dernier a malheureusement été injecté sur une orbite plus basse que prévue en raison d’un dysfonctionnement de l’étage supérieur du lanceur.
Où en sommes-nous à ce jour ? Le système de propulsion ionique qui permettra à Artemis de rejoindre l’orbite géostationnaire à environ 36 000 km d’altitude devrait être mis sous tension vers la fin janvier (date visée : 24-25 janvier). Un nouveau logiciel conçu pour faire fonctionner le système de propulsion d’une manière radicalement différente de ce qui avait été prévu a été élaboré, chargé et testé. Artemis devrait arriver à destination d’ici la fin juillet.
En novembre (le 20 novembre), le propulseur à poudre d’Ariane-5 a fait l’objet d’un essai à feu au Centre spatial guyanais à Kourou, qui a permis de qualifier un segment avant « surchargé » contenant 2,2 tonnes supplémentaires de propergol solide (10 % de sa masse). Ce nouveau segment augmentera d'environ 200 kg la capacité d'emport du lanceur sur orbite GTO.
Novembre 2001 a toutefois été marqué au premier chef par la tenue de la session du Conseil de l’ESA au niveau ministériel à Édimbourg.
A cette occasion, en effet, l’Agence a accompli des avancées considérables, qu’il s’agisse de l’élaboration d’une série de programmes d’avenir ou de son engagement profond en faveur d’une coopération plus étroite avec l’Union européenne. Je tiens à mettre en lumière le contenu programmatique de cette initiative fondamentale et j’inviterai M. Poncelet à illustrer par des explications supplémentaires l’importance politique de cette session du Conseil au niveau ministériel.
A Édimbourg, les ministres de l’ESA ont adopté une Résolution qui souligne l’importance d’un programme spatial équilibré au service du citoyen européen. Ils ont souscrit des Déclarations, prenant des engagements financiers pour réaliser des programmes dans toutes les disciplines de l’espace : science spatiale, télécommunications, observation de la Terre, lanceurs, vols spatiaux habités, etc. Ces engagements atteignent le montant impressionnant de 7,8 milliards d’euros sur les 4 à 5 ans à venir, dont presque 20 % sont affectés aux programmes de gestion Galileo et GMES, à mettre en place en coopération avec l’Union européenne.
Le système européen de navigation par satellite Galileo, qui est un élément majeur de la politique de transport de l'Europe, offrira une large gamme de services de navigation autonomes aux utilisateurs commerciaux et privés et doit générer de nouveaux services commerciaux, avec les recettes correspondantes, dans des domaines comme la navigation à bord des véhicules automobiles et le contrôle du trafic aérien. Les Ministres de l'ESA ont pleinement pris conscience de ces enjeux puisqu'ils ont entièrement souscrit la part de l'Agence pour la phase de développement et de validation du programme (528 Meuros).
Nous attendons maintenant avec confiance l'approbation par les Ministres des transports de l'UE de leur contribution à Galileo lors de la réunion qu'ils doivent tenir en mars prochain.
D'ici là, il n'est pas question de rester inactif. Il faut que l'Europe développe un certain nombre de technologies clés, notamment des horloges atomiques ou des générateurs de signaux capables de résister à l'environnement hostile caractéristique des orbites sur lesquelles évoluent les satellites de navigation (environ 22 000 km). Nous ne pouvons pas nous permettre de bloquer les activités industrielles et de perdre ainsi les compétences et la dynamique acquises. Les contrats industriels en cours pour ces développements technologiques représentent environ 60 Meuros.
La coopération avec l'Union européenne portera également sur le programme de Surveillance globale pour l'environnement et la sécurité (GMES), qui traitera notamment du changement planétaire, des risques naturels et anthropiques, de l'évolution de l'environnement et du suivi de l'application des traités.
L'exploitation de Soyouz à Kourou n'a pas été soumise à décision à Edimbourg. Toutefois, les Ministres m'ont chargé, sur cette question particulière, de finaliser, avec l'ensemble des partenaires concernés, tous les éléments nécessaires pour qu'une décision puisse être prise quant à l'ouverture du CSG à Soyouz. Le Conseil de l'ESA sera appelé à se prononcer sur ce point d'ici l'été.
La stratégie visant à assurer un accès indépendant à l'espace pour un coût abordable repose sur la fourniture de systèmes de lancement européens compétitifs. Les Ministres ont souligné que, pour que cette stratégie se concrétise, il fallait veiller au bon équilibre des rôles, responsabilités et engagements financiers respectifs des secteurs public et privé.
La restructuration du secteur des lanceurs en Europe est d'une importance capitale. Les Ministres nous ont assigné les objectifs suivants:
- améliorer l'évaluation et la maîtrise des coûts de développement des projets bénéficiant d'un financement public,
- réduire les coûts des phases de développement et de production,
- accroître la transparence des activités industrielles,
- assurer une étroite corrélation entre les exigences définies par l'ESA sur la base d'études de marché et la définition des nouvelles activités de développement proposées par l'industrie,
- renforcer la solidarité européenne par une répartition équitable des rôles et des bénéfices entre les Etats membres et leurs industries respectives.
Cette vaste entreprise de restructuration du secteur européen des lanceurs doit être conduite main dans la main entre le secteur public et le secteur privé. Les Ministres ont invité l'industrie à poursuivre parallèlement sa propre restructuration en tant que contribution aux objectifs assignés à l'ESA. La date limite fixée est celle du prochain Conseil au niveau ministériel, qui doit se tenir en 2003 en Allemagne.
En ce qui concerne les discussions en cours aux Etats-Unis sur la future configuration de la Station spatiale internationale (ISS), les Ministres européens on adressé un message clair aux partenaires de l'ISS en confirmant que l'Agence remplirait toutes ses obligations et attend de la NASA qu'elle respecte ses engagement internationaux.
Le montant de 1869 M€ alloué aux sciences spatiales pour la période 2002-2006 ne reflète qu’une modeste augmentation de 2,5 %, de sorte que le Directeur du Programme scientifique a engagé un processus de réflexion pour voir comment il serait possible, compte tenu de l’enveloppe financière approuvée, d’obtenir un plan équilibré et judicieusement réparti dans le temps. Cet exercice durera jusque juin prochain et associera la communauté européenne des sciences spatiales dans son ensemble ainsi que le Comité du Programme scientifique de l’ESA.
Dans le même temps, quatre missions importantes seront lancées au cours de cette année ou en 2003 : il s’agit d’Integral, de Smart-1, de Rosetta et de Mars-Express. Actuellement, les véhicules spatiaux Rosetta et Integral sont soumis à des essais dans notre Centre de l’ESTEC qui se trouve aux Pays-Bas.
L’ESA et l’Union européenne
L’Agence est en train de nouer des liens plus étroits avec l’Union européenne. L’Europe doit désormais exploiter plus efficacement le potentiel stratégique des systèmes spatiaux en vue d’élargir ses objectifs scientifiques, économiques, sociaux et politiques. Les Ministres qui se sont réunis à Édimbourg ont renouvelé et élargi notre mandat pour resserrer les relations avec l’Union européenne.
Le processus consistant à allier les objectifs politiques de l’Union européenne et les capacités de l’Agence spatiale européenne a démarré il y a déjà quelques années. L’ESA et l’UE sont désormais engagées dans le développement et la mise en œuvre d’une politique spatiale véritablement européenne. Les fondations de cette politique ont été posées en novembre 2000, lorsque les Conseils respectifs de l’ESA et de l’UE ont entériné un document conjoint relatif à une Stratégie européenne pour l’espace.
Moments forts de 2002
Fin février | Lancement d’Envisat, la date visée étant la nuit du 28 février au 1er mars |
---|---|
Avril/mai | Vol de Roberto Vittori à bord de l’ISS ( 27 avril au 5 mai, à confirmer) |
Mai | Vol de l’astronaute français Philippe Perrin (CNES) vers l'ISS : 2 au 13 mai |
Juillet | Premier lancement d’Ariane-5 ESCA qui placera 9 tonnes sur GTO |
Août | Lancement de Météosat de seconde génération (Eumetsat) |
Octobre | Lancement d’Integral à Baïkonour (17 octobre) |
Novembre | Vol Soyouz vers l’ISS, avec la présence à bord de Frank de Winne (Belgique) : 4 au 14 novembre |
Décembre | Essais à feu du moteur Vinci d’Ariane-5 |
Décembre | Lancement de SMART-1 par Ariane-5 |
En ce qui concerne l’anomalie qui s’est produite sur le Vol Ariane 510 emportant le satellite Artemis, Arianespace, en collaboration avec l’industrie et l’ESA, a effectué, sur les deux bancs d’essai qui se trouvent en Allemagne, plus de 200 essais du moteur Aestus de l’étage supérieur. Associés à des modèles numériques, ces essais ont démontré la robustesse des moteurs dans des conditions de fonctionnement normal et ont permis d’identifier le scénario le plus probable à l’origine de l’anomalie du Vol 510 (la présence de traces d’eau dans les lignes d’ergols a très vraisemblablement provoqué les instabilités haute fréquence lors de l’allumage).
Les changements apportés consistent principalement en une modification de la séquence d’allumage et en la mise en œuvre d’essais de recette plus stricts (meilleur contrôle de l’humidité interne, etc.). Le moteur de l’étage supérieur qui sera utilisé pour l’emport d’Envisat a été installé sur le banc d’essai le 9 janvier pour y subir une série de 10 tests qui ont été éxécutés avec succès les 11 et 12 janvier. A la fin de ces vérifications, le moteur Aestus destiné à Ariane 511 sera décontaminé, purgé et réassemblé, avant d’être intégré sur l’étage supérieur d’Ariane-5 et acheminé par avion à Kourou début février.
Nous sommes pleinement satisfaits des résultats de ces essais et sommes convaincus que, dans quelques semaines, nous pourrons avec Arianespace apporter à nouveau la preuve qu’Ariane-5 est un très bon lanceur et que l’Europe a fait un très bon choix.
Merci de votre attention et permettez-moi de vous souhaiter à nouveau une Bonne et heureuse année.