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Le premier lancement d'Ariane
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Ariane fête ses 30 ans

17/12/2009 4387 views 2 likes
ESA / Space in Member States / Switzerland - Français

Afin de célébrer le 30ème anniversaire du premier lancement d’Ariane, retour sur l'histoire de cet élément majeur du programme spatial européen, des origines du projet à ce jour de décembre 1979 qui a donné son indépendance spatiale à l’Europe.

Lorsque l’ESA a démarré en 1975, l’un de ses premiers objectifs a été de construire un lanceur européen. La raison en était simple : pas de lanceur – pas d’indépendance dans l’accès à l’espace – pas de programme spatial.

Bien que les membres de l’ESA aient des intérêts et des priorités divergents – certains étaient intéressés par la recherche spatiale, tandis que d’autres souhaitaient développer des satellites –tous étaient unanimes sur un point : l’Europe avait besoin d’avoir son indépendance dans l’accès à l’espace et d’avoir son propre programme spatial. Cela signifiait qu’il lui fallait développer des lanceurs et sa propre base de lancement.

En 1964, le gouvernement français a choisi Kourou, en Guyane, comme base pour le lancement de ses satellites. Lorsque l’ESA a été créée, le gouvernement français a proposé de partager son Centre Spatial Guyanais (CSG) avec la nouvelle agence spatiale. De son côté l’ESA se montrait favorable à bénéficier des facilités de lancement du CSG afin de préparer une base de lancement pour les lanceurs Ariane en développement.

15 décembre 1979 : le premier vol

La salle de contrôle du lanceur explose de joie au moment du décollage d'Ariane
La salle de contrôle du lanceur explose de joie au moment du décollage d'Ariane

Le premier vol d’une fusée Ariane était programmé pour le 15 décembre 1979. Ce jour là, devant un public important et impatient, le compte à rebours a atteint le zéro et le moteur sous le lanceur s’est mis à vrombir – et puis il s’est éteint.

Heureusement, la défaillance n’était pas grave et le lancement a été reprogrammé au 23 décembre. Mais le mauvais temps et quelques petits problèmes techniques ont amené à repousser de nouveau le lancement. La tentative suivante sera la bonne. Le 24 décembre, à 14h14 heure locale, Ariane 1 est partie dans l’espace depuis la base de lancement européenne. Une page essentielle de l’aventure spatiale de l’Europe avait commencé.

Le remarquable succès du premier lancement d’Ariane résultait aussi de la réussite d’un esprit d’équipe. Durant six ans, les équipes d’industriels de chaque Etat membre de l’ESA, participant au programme, ont travaillé dur sans n’avoir jamais aucun doute sur l’issue. Ils mirent au point un lanceur de trois étages capable de placer dans une orbite géostationnaire un satellite de près d’une tonne. Ariane est un symbole, puisqu'il est le premier système de transport spatial à avoir été commercialisé dans le monde entier.

« Les 30 années de réussite d’Ariane sont un succès à la fois politique, technique et commercial, qui est devenu un des symboles forts de l'Europe du progrès. Rien n’aurait pu se faire sans l’impulsion initiale de la France et de son agence spatiale, le CNES, mais rien non plus n’aurait pu se faire sans les autres Etats membres de l’ESA qui ont apporté le savoir-faire de leur industrie, les finances nécessaires et la solidarité qui a rendu possible – tous ensemble – la transformation des échecs en succès », a expliqué Jean-Jacques Dordain.

Les origines d'Ariane

Le directeur de l'ESA, General Roy Gibson, fête le lancement d'Ariane à Kourou
Le directeur de l'ESA, General Roy Gibson, fête le lancement d'Ariane à Kourou

La France est devenue la troisième puissance spatiale au monde avec le lancement de Diamant A en 1965. Le succès français s'est poursuivi avec Diamant B en 1970, mais ces petits lanceurs n'étaient pas appropriés pour lancer des satellites plus importants et ne pouvaient donc pas répondre à la demande du marché. Le précurseur de l'ESA, l'European Launcher Development Organisation (ELDO) (en français, CECLES, Centre Européen pour la Construction de Lanceurs d'Engins Spatiaux), avait développé le lanceur Europa, qui avait été proposé lors de la Lancaster House Conference, en Grande-Bretagne en 1963, comme un lanceur de satellites civils sur la base d'éléments fournis par les différents pays européens.

Les tâches avaient été réparties entre les différentes nations : la Grande-Bretagne se chargeait du premier étage (un dérivé du missile Blue Streak), la France s'occupait du deuxième étage et l'Allemagne du troisième. Le projet a rencontré de nombreux problèmes techniques. Bien que l’essai du premier étage ait été un succès, à chaque fois les tentatives avec les autres étages ont échouées. En février 1973, le programme Europa était arrêté.

La France avait compris que l'indépendance dans l'accès à l'espace était d'une importance stratégique primordiale. Lors de la Conférence européenne sur l'espace, en décembre 1972, le ministre français de l'industrie, Jean Charbonnel, avait déjà proposé un plan pour développer en Europe des capacités autonomes de lancement de satellites de télécommunication. Lors de cette même réunion, le ministre britannique de l'espace proposa qu'une seule agence spatiale soit créée à partir d'ELDO et d'ESRO.

Une débat acharné entre européens allait se dérouler pour savoir ce que serait le premier système de lanceur commercial au monde. La Grande-Bretagne avait abandonné toute ambition de développer une industrie pour un lanceur autonome européen et voulait se contenter d'utiliser les fusées américaines. L'Allemagne semblait avoir perdu tout intérêt pour Europa III, bien que son soutien dans ce projet ait été essentiel.

Puis, en mars 1973, avant qu'aucun accord européen n'ait été trouvé, la France a annoncé qu'elle contribuerait à la majeure partie des fonds nécessaires pour le développement d'une « troisième génération de lanceur de substitution » (L3S), en remplacement d'Europa.

En juillet, les partenaires européens se sont retrouvés lors de la 6ème conférence européenne sur l'espace. La France était sur le point de construire un lanceur, l'Allemagne voulait collaborer au Spacelab de la NASA et la Grande-Bretagne mettait sur pied un satellite de communication maritime, MAROTS. Mais la conférence a finalement mis d'accord les trois nations. Chacun des partenaires a compris qu'il n'obtiendrait ce qu'il souhaitait qu'en acceptant de coopérer sur les projets de chacun. Paradoxalement, cet accord a été trouvé, en partie grâce à la politique des Etats-Unis. « Les Etats-Unis était la seule nation de l'Ouest à posséder des véhicules de lancement, mais les conditions qu'ils proposaient pour lancer les satellites européens étaient totalement inacceptables. Ils voulaient que nos satellites fonctionnent exclusivement sur la zone européenne, ce qui bien sûr aurait empêché l'Europe d'étendre son influence politique et culturelle à travers le monde et l'empêchait d'entrer en compétition avec eux sur le marché mondial », explique Charles Hanin, alors ministre belge de la science.

Un lanceur nommé Ariane

Ariane 5 au décollage
Ariane 5 au décollage

Le premier projet de lanceur était connu sous le nom de « lanceur à 3 étages de substitution » ou L3S. Lors de la réunion de 1977, les délégués de l'ESA ont été interrogés pour lui trouver un nouveau nom. Dr Peter Creola, ancien président du Swiss Space office (SSO) et délégué suisse au Conseil de l'ESA raconte comment le lanceur a été rebaptisé.

« Le jour qui a suivi la réunion finale à Bruxelles, j'ai proposé que le nom complexe du lanceur, L3S (qui signifie 'lanceur de troisième génération de substitution') soit remplacé par un nom définitif plus attrayant. Seul le délégué de la France, André Lebeau, a suivi la Suisse sur cette proposition.

Tous les autres pensaient que le nom du lanceur n'avait aucune importance. Cependant, j'ai insisté sur ce point et j'ai passé un bout de papier sur le lequel chaque délégué pouvait suggérer un nom. Certains d'entre eux étaient seulement des plaisanteries, tels que « William Tell » et « Edelweiss », qui ont été proposés parce que la réunion se tenait le 1er août 1973, le jour de la fête nationale suisse.

D'autres suggestions, comme 'Orion' et 'Vega', étaient plus appropriés. Ce dernier nom est revenu trois fois, et par suite a remporté cette compétition informelle. Aucun nom n'avait cependant était décidé de manière officielle. Dans le texte d'accord sur le lanceur, qui était toujours en négociation, un blanc avait été laissé à la place du nom du lanceur.

Puis, en septembre 1973, le jour vint où le document d'accord devait être approuvé par le Comité Administratif et Financier de l'ESA. Coïncidence, je présidais ce comité. Quand j'ai proposé qu'à présent nous enlevions le blanc et que nous insérions le nom de Vega dans le texte, la délégation française a émis une objection. Le ministre français Jean Charbonnel a expliqué que Vega était le nom d'une bière française

Les français considéraient seulement trois noms comme étant acceptables : 'Penelope', 'Phoenix' et 'Ariane'. La délégation allemande a immédiatement mis un veto sur Phoenix, parce que les cendres de l’ELDO étaient encore chaudes. Penelope a aussi été jugé inapproprié, et donc c'est Ariane qui a été choisi. Personne ne pouvait prévoir que presque 30 ans plus tard, un autre lanceur, le petit lanceur de l'ESA, en phase finale de développement actuellement, serait baptisé Vega.

Ariane dans les faits

Né quelques minutes après le décollage,  le bébé Ariane Girouard a été nommé ainsi après le lancement d'Ariane 1
Né quelques minutes après le décollage, le bébé Ariane Girouard a été nommé ainsi après le lancement d'Ariane 1

La sonde de l'ESA, Giotto, à destination de la comète Halley a été lancée par la 10ième Ariane 1 en juillet 1985

Le dernier lancement réalisé par Ariane 1 transportait le premier satellite SPOT, le 22 février 1986 (11 lancements réalisés par Ariane 1 ont eu lieu entre 1979 et 1986).

Ariane 3 a établi un record à l'époque avec 11 vols entre 1984 et 1989.

Ariane 4 était connu sous le nom de « cheval de bataille» de la famille des Ariane, ayant réalisé 113 lancements réussis et transportant plus de 180 satellites.

Sur sa durée de vie, Ariane 4 a capté plus de 50% du marché commercial des satellites géostationnaires en orbite, faisant la preuve que l'Europe pouvait tenir sa place dans le domaine des lancements commerciaux.

L'ESA a, à l'origine, mis au point Ariane 5 pour aller plus loin dans la réduction des coûts des lancements commerciaux de satellites et pour lancer la navette spatiale Hermes, dans les années 80.

Le premier lancement commercial d'Ariane 5 (L504) s'est déroulé le 10 décembre 1999 avec le lancement du satellite de l’ESA d'observation des rayons X, XMM-Newton.

La dernière version d'Ariane 5, ECA, a été mise au point pour placer des charges utiles pesant jusqu'à 9,6 tonnes dans l'orbite géostationnaire.

La version Ariane 5 " ES ATV", mise au point pour lancer le véhicule automatique de transfert (ATV), est capable d'emporter près de 21 tonnes dans l'orbite basse de la terre. Son vol inaugural a eu lieu en 2008, transportant avec succès le premier ATV, baptisé « Jules Verne » vers l'ISS.

En mai 2007, une Ariane 5 ECA a établi un nouveau record commercial, transportant en orbite deux satellites avec un poids total de 8,6 tonnes. Plus tard, dans la même année, Ariane 5 ECA a dépassé ce record en lançant une charge utile d'un poids total de 9,5 tonnes.

Le 1er juillet 2009, une Ariane 5 ECA a lancé Terre-Star-1, le plus gros satellite de télécommunication jamais construit.

Pour plus d'informations

Des interviews concernant Ariane et et les faits marquant du programme spatial européen sont disponibles sur : ESA's Oral History web site. Vous pouvez retrouver : Frédéric D'Allest, Michel Bignier, Peter Creola, Hubert Curien, Bernard Deloffre, Roy Gibson, Klaus Iserland, Guy Kramer, Raymond Orye et Yves Sillard.

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