Cuisine “trois étoiles” sur la route de Mars
Les technologies spatiales apportent de nouvelles solutions pour le traitement de la nourriture sur Terre et, en contrepartie, les voyageurs de l’espace pourront se régaler avec des menus gastronomiques pendant les missions de longue durée.
A l’occasion du Salon International de l’Alimentation (SIAL), qui se déroule cette semaine à Paris, l’ESA présente un échange d’idées sur la nourriture et l’espace, allant jusqu’à présenter des recettes pour les futures expéditions martiennes.
« Chaque année nous recherchons et nous développons un certain nombre de technologies pionnières pour l’exploration spatiale. Nombre d’entre elles ont un potentiel d’innovation sur Terre, et cela concerne aussi l’alimentation » déclare Pierre Brisson, chef du bureau de transfert et de promotion de technologies de l’ESA. « Certaines technologies ont déjà débouché sur de nouveaux systèmes, efficaces et rentables, dans les domaines du refroidissement, des emballages intelligents, de la conservation ou de la désinfection ».
L’ESA fait équipe avec le centre de formation culinaire Alain Ducasse Formation (ADF) pour définir des recettes afin de confectionner de bons petits repas pour les voyageurs de l’espace tout en utilisant un nombre très limité d’ingrédients, qui pourraient tous être produits sur d’autres planètes.
Production de nourriture pour missions de longue durée
« Pour le moment, nous emportons toute la nourriture pour nos missions spatiales depuis la Terre, que ce soit à bord de la Station Spatiale Internationale, des Soyouz ou de la Navette Spatiale. Toutefois, pour les missions de plus longue durée vers Mars, nous ne pouvons plus tout expédier depuis la Terre – cela serait à la fois trop lourd et nécessiterait trop de volume pour le stockage – aussi faisons nous des recherches sur les plantes que nous pourrions cultiver dans l’espace » explique Christophe Lasseur, coordinateur du support-vie biologique à l’ESA, responsable du recyclage et de la production d’air, d’eau et de nourriture pour les missions habitées de longue durée.
Une mission vers Mars devrait durer au moins 24 mois : six pour l’aller, six pour le retour et 12 mois sur la planète. Avec la nécessité de réduire au maximum l’emport de nourriture depuis la Terre, l’objectif initial est d’assurer 5 à 10% du ravitaillement au cours de la mission et 40 à 50% lors du séjour à la surface de la planète à l’aide de nourriture cultivée dans l’espace.
« Pouvoir faire pousser des plantes c’est bien, mais il faut aussi les préparer avant de les consommer. Notre prochain défi est donc de cuisiner des plats qui seront non seulement bons pour les papilles mais aussi pour la santé, tout en étant suffisamment nutritifs pour assurer la survie de l’équipage et lui apporter un bon soutien physiologique pendant ces longs mois loin de la Terre », souligne Christophe Lasseur.
« Nous ne pouvons pas cultiver toutes les plantes aussi devons nous en sélectionner quelques unes qui peuvent servir de base à des plats multiples. En ce moment nous faisons des expériences avec huit plantes, mais nous aurons peut-être à augmenter ce nombre » ajoute-t-il. Un autre aspect important à prendre en compte est qu’il ne sera pas possible d’emmener sur Mars une cuisine complète avec tous ses gadgets, ce qui fait que les plats devront également pouvoir être consommés après une préparation simple.
« Nous avons fait équipe avec ADF pour définir un certain nombre de recettes qui pourront être réalisées avec les quelques ingrédients que nous sommes susceptibles de produire sur Mars, et avec un nombre limité d’ustensiles de cuisine. La société française GEM étudie pour nous une batterie d’ustensiles qui pourraient être utilisée sur Mars » poursuit Christophe Lasseur.
Technologies spatiales pour nourritures terrestres
Le Glace® est une conteneur original pour les boissons qui assure leur réfrigération à la demande en quelques minutes. Le principe de base a été utilisé pendant des siècles avec les jarres de terre cuite ou les outres en peau, qui sont refroidies par l’évaporation de l’eau transpirant à leur surface. Lorsque la société française Thermagen lui a appliqué des procédés de simulation numérique de haute technologie développés pour la modélisation de missions spatiales de l’ESA, il est devenu possible de calculer et de contrôler avec précision le comportement de ce phénomène complexe et de concevoir un conteneur auto-réfrigérant.
Cette technique de refroidissement a été expérimentée pour la première fois lors du Rallye Paris-Daker en janvier 2003. Thermagen avait alors fourni des conteneurs auto-réfrigérants pour rafraîchir les boissons de l’écurie Pescarolo. L’évaporation d’un centilitre d’eau sous vide dans une céramique spéciale permettait de baisser de 15° C la température de la boisson à l’intérieur du conteneur.
EASY2COOL est un autre système original pour la réfrigération de la nourriture durant les transports conçu à partir de technologies spatiales. La technique de base est utilisée par l’ESA pour refroidir les équipements de stations terrestres et les éléments de satellites durant leur transport sur Terre. Elle utilise un principe physique très simple : lorsqu’une substance change d’état du solide vers le liquide, elle absorbe une certaine quantité d’énergie, en maintenant la température stable, jusqu’à ce que toute la substance soit devenue liquide.
Même si ce phénomène est “simple”, la société italienne D’Appolonia et ses partenaires ont dû baser leur système réfrigérant sur la technologie utilisée dans les stations terrestres afin de maîtriser la fonction et de la combiner avec les liquides développés spécialement pour cette application. Ces “fluides eutectiques de longue durée” sont capables de maintenir une température donnée pendant les durées nécessaires. Deux systèmes ont été développés et testés à ce jour - l’un maintient une température de – 26° C pendant 8 heures, l’autre + 4° C pendant 33 heures – permettant le transport de viandes et d’autres aliments, congelés ou réfrigérés. Pendant sa “durée d’autonomie opérationnelle”, le système fonctionne sans consommation d’énergie ni pièce mobile ce qui permet de s’affranchir des limitations des camions frigorifiques actuels. C’est aussi très économique.
Le système SAFE-MEAT utilise un élément plaqué de céramique infrarouge issu de systèmes de propulsion spatiaux pour désinfecter sous vide les équipements destinés au traitement de la viande. Ce système est plus sûr que les systèmes conventionnels utilisés aujourd’hui puisqu’il fonctionne sous un courant d’à peine 36-48 Volts au lieu de 220 Volts. La différence est importante pour les personnels en charge de ces désinfections car cells-ci sont réalisées dans un environnement humide. Ce système permet d’économiser 45% d’énergie et son entretien est moins coûteux.
Le 19 octobre est le jour du transfert de technologie de l’ESA au SIAL
Le Bureau de Transfert et de Promotion des Technologies (TTP) de l’Agence Spatiale Européenne présente les échanges de technologies, de savoir-faire et d’expertise entre l’alimentation sur Terre, l’agriculture sur d’autres planètes, la création de repas gastronomiques et nourrissants pour les astronautes et la haute technologie des programmes spatiaux européens au stand de l’ESA, dans le Hall 5A, stand K006.
11h00 : L’alimentation pour les vols vers Mars
Christophe Lasseur, coordinateur du support-vie biologique à l’ESA, présente les activités de l’agence pour définir comment la nourriture pourrait être produite au cours des futures missions martiennes.
Florence Cane d’Alain Ducasse Formation discute de la création de nouvelles recettes préparées avec aussi peu d’ingrédients que possible mais offrant néanmoins aux astronautes un repas de goût.
Michel Timsit de la société française GEM présente une étude sur les nouvelles procédures pour la cuisine lors des futures missions planétaires.
12h00 : Technologies spatiales pour l’industrie alimentaire : EASY2COOL et SAFE-MEAT
Sara Parodi et Lorenzo Perelli de la société D'Appolonia, membre du réseau de transfert de technologies de l’ESA, présentent deux systèmes originaux utilisant les technologies spatiales pour le transport réfrigéré et le désinfection des équipements.
14h00 : Boissons fraîches grâce à un emballage dérivé des technologies spatiales
Fadi Khairallah de Thermagen démontre comment les technologies spatiales de pointe permettent de mettre à profit une technique connue depuis des siècles pour développer un conteneur à boisson moderne.
15h00 : Comment les technologies spatiales peuvent soutenir l’industrie alimentaire
Le Bureau de Transfert et de Promotion des Technologies (TTP) de l’ESA rend les technologies spatiales disponibles pour l’utilisation sous licence ou pour de nouveaux développements afin de stimuler les retombées du secteur spatial et en faire bénéficier la vie sur Terre.
Alexandre Hulin de Bertin Technologies, membre du réseau de transfert de technologies de l’ESA, présente d’autres aspects de l’utilisation des technologies spatiales sur Terre et comment celles-ci peuvent être obtenues à travers le programme de transfert de technologies de l’ESA et son réseau d’agents en Europe et au Canada.
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Pierre Brisson
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Christophe Lasseur
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