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Armelle Hubault
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Quand la vie réelle surpasse l'animation

07/10/2016 1310 views 6 likes
ESA / Space in Member States / France / Rosetta

Avec la fin des opérations pour la mission Rosetta, nous avons demandé aux ingénieurs de nous confier une anecdote personnelle relative à la mission.

Voici celle que nous a envoyé Armelle Hubault, ingénieur au sein de l'équipe de contrôle de Rosetta, en charge des aspects liés au sous-système de télécommunications, du système d'automatisation et de certains instruments.

"Ce n'est pas une anecdote amusante à proprement parler, mais l'un des moments les plus satisfaisants alors que je faisais partie de l'équipe de contrôle de Rosetta. Cela s'est passé peu de temps avant le survol de l'astéroïde Lutetia.

"J'ai beaucoup de difficultés à penser à Rosetta en 3D. C'est à dire visualiser son attitude dans l'espace, à la bonne position et distance du Soleil en fonction de tous les autres objets célestes. C'était particulièrement vrai pendant la croisière, alors que nous voyagions aux quatre coins du Système Solaire !

"Alors que que préparais les opérations pour le survol de Lutetia pendant l'été 2010, j'utilisais un outil nommé Celestia pour essayer de mieux comprendre la géométrie du survol. Ce faisant, je me suis rendue compte que le logiciel - qui est très précis - plaçait la planète Saturne juste en arrière-plan de l'astéroïde lors de la phase d'approche. J'observais une conjonction et même une occultation de Saturne par Lutetia ! En d'autres mots Celestia me suggérait qu'en regardant Lutetia, Rosetta pouvait aussi voir Saturne disparaître derrière Lutetia!

L'astéroïde Lutetia avec en arrière-plan la planète Saturne
L'astéroïde Lutetia avec en arrière-plan la planète Saturne

"Bien sûr ceci n'est qu'une simulation qui dépend de la façon dont les objets sont modélisés (à cette époque on ne connaissait encore ni la taille ni la forme de Lutetia), et de la précision des fichiers contenant les trajectoires. Je restais raisonnable et espérais qu'à défaut d'une occultation, nous pourrions au moins observer les deux objets ensemble. J'ai alors contacté Michael Küppers, un collègue du Centre des Opérations Scientifiques à l'ESAC près de Madrid. Il s'occupait du pointage de Rosetta et avait beaucoup d'expérience en particulier sur OSIRIS, notre caméra scientifique.

"Je lui ai demandé s'il pouvait confirmer mes observations, et s'il serait théoriquement possible de prendre une photo. En effet Saturne était très lointaine et très peu lumineuse, alors que Lutetia était très proche et très lumineux. Ma simulation ne prenant pas en compte le champ de vision de la caméra, je ne savais pas si une photo était possible ou pas.

"Après investigation, Michael confirma que l'on pouvait tenter quelque chose, et il ajouta la requête pour cette prise de vue aux commandes à exécuter pendant le survol. 

"Le résultat est cette image superbe dont je me sens très fière." 

 

Retrouvez également Armelle Hubault dans cet entretien effectué mi-2014. 

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